Un pacemaker est un appareil qui donne des impulsions électriques pour faire battre le cœur des personnes qui ont le rythme cardiaque irrégulier ou trop lent.
Raymond a 91 ans et il aurait sans doute besoin d’un pacemaker après une vie d’employé de bureau, peu de sport et pas mal de cigarettes.
Mais il a mieux que cela : Raymond est passionné de trains électriques Märklin.
« Mieux qu’un pacemaker pour faire battre mon cœur »
Cette passion brûle Raymond et le fait vivre plus intensément que bien des personnes de 20, 30 ou même 50 ans de moins que lui.
Son grand projet est de reproduire les plus grandes gares de triage autour de Paris en 1955. Pour terminer, il a besoin d’exactement quinze années au rythme où il avance. Et je suis convaincu qu’il va le faire.
C’est lui qui m’a expliqué que sa passion pour les trains électriques fait « mieux qu’un pacemaker pour faire battre son cœur ».
Et c’est exactement ce que constatent les vieux médecins expérimentés.
Au-delà de 80 ans, toute personne qui décède meurt de « mort naturelle ». 80 ans, c’est déjà beaucoup. Mais ce qui fait la plus grande différence, après, entre les personnes qui s’éteignent et les super centenaires, c’est cette volonté, le besoin de vivre, la motivation qui vous fait vous lever tous les matins et qui vous tient éveillé chaque soir jusque tard dans la nuit parce que vous avez un but, une passion, un projet.
L’idéal : une passion qui sollicite tous vos sens et toutes vos capacités
Les trains électriques sont une passion qui a dévoré beaucoup de personnes de la génération de Raymond.
Pour créer un beau train électrique, avec les paysages, vous avez besoin d’apprendre la menuiserie et la charpente ; de connaître l’électricité ; de savoir peindre et souder. Vous devez faire des plans et savoir travailler tous les matériaux qui permettent de reproduire les effets de la neige, d’une prairie fleurie, d’une forêt, construire des ponts, des hangars et des échangeurs. Vous devez même vous intéresser à l’ornithologie (science des oiseaux) si vous souhaitez reproduire comme il faut les volatiles qui survolent vos trains, et à l’architecture pour reproduire des villages. Vous devez gérer les bruitages et si possible ajouter de la musique. Vous devez même connaître la couture pour vêtir vos voyageurs et les passants à la mode de l’époque de votre réseau, sans faire d’anachronisme !
Votre cerveau et tous vos sens sont sollicités. C’est la meilleure protection dont vous puissiez rêver contre l’Alzheimer et les démences séniles.
En fait, il est difficile d’imaginer une passion plus complète et créatrice que les trains électriques, et il est très dommage que cette passion soit en voie de disparition rapide.
« Ma femme dit que je suis un objet de collection »
Longtemps, les beaux trains électriques se sont échangés pour des fortunes, cela faisait partie des objets de collection les plus recherchés.
Mais aujourd’hui, ce sont les collectionneurs eux-mêmes qui sont de plus en plus rares.
« Ma femme dit que c’est moi, l’objet de collection », dit Raymond en souriant.
Selon le président de l’Association américaine des trains électriques, l’âge moyen des collectionneurs de trains électriques est désormais de… 64 ans.
Les passionnés sont de plus en plus vieux, et il semble n’y avoir aucune relève à l’horizon.
L’âge moyen des passionnés de trains électrique est aujourd’hui de 64 ans.
L’association organise chaque hiver un cours de vingt heures d’initiation gratuite à la construction de trains électriques. L’année dernière, personne ne s’est inscrit.
Cette année, ils étaient onze pour la première session. Six avaient plus de 60 ans. Il y avait un jeune, Alex Edder, 15 ans, titulaire de la médaille du mérite scout pour ses maquettes de train.
En France, la Fédération française du modélisme ferroviaire est en pleine décélération elle- aussi. L’association invoque la réduction des surfaces habitables, le coût du matériel… Ma crainte est que l’explication soit plus triste que cela : il devient difficile de convaincre un jeune d’abandonner son iPhone, sa tablette ou ses jeux vidéo pour faire l’effort d’une passion aussi exigeante et féconde.
Quoi de plus beau en effet qu’une passion qui sollicite tous vos sens et toutes vos capacités, pour laquelle une vie entière ne suffit pas, et de loin, pour tout découvrir ?!
C’est pourtant exactement ce qu’il faut quand on veut vivre vieux, et heureux.
Le moment où le patient cesse d’avoir la volonté de vivre
Pour ma part, j’ai un très bon ami de 79 ans qui restaure des voitures anciennes. Il recherche les Rover, Triumph, Jaguar d’avant 1965.
Ces marques prestigieuses sont chères évidemment, mais leur intérêt incomparable est d’avoir été faites à la main. Cela veut dire qu’on peut refaire aujourd’hui les pièces manquantes ou cassées. Il « suffit » de maîtriser le travail du métal, du bois (pour les tableaux de bord par exemple) ou du cuir (pour les fauteuils).
C’est ce qui fait leur intérêt pour les collectionneurs passionnés. Lorsqu’il est dans son atelier, mon ami n’a plus d’âge, plus de malheurs, plus de maladies. Il vit intensément, entièrement absorbé par ses projets. Et je suis certain qu’il sera toujours là dans de nombreuses années. Quand il en a fini une, il la revend plus cher, ce qui lui permet d’en acheter une plus belle !
Sa passion ne lui laissera pas le loisir de partir en maison de retraite !
Car la plus dangereuse maladie, c’est le moment où le patient cesse d’avoir la volonté de vivre.
À votre santé !
Jean-Marc Dupuis
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